Jetant des coups d'œil autour d’elle, Aria se sentait observée, mais n’arrivait pas à deviner d’où cela provenait. Peut-être était-ce les hommes de son père qui l’avait prise en filature pour la surveiller, ou alors c’était simplement son imagination qui lui jouait des tours. Il fallait dire que depuis plusieurs jours, elle se sentait encore plus enfermée dans une tour dorée, incapable de faire ses propres choix et de vivre sa vie comme elle l’entendait. Alors, quand la frustration était bien trop grande, Aria laissait de côté ses beaux vêtements, enfilant simplement un vieux survêtement et un gros sweat et disparaissait dans la nuit comme une voleuse. Ce n’était pas la première fois qu’elle faisait le mur, quittant la maison des Fujiwara aux yeux et à la barbe de tous. Avec le temps, elle avait appris quelques techniques et jusqu’à présent jamais personne ne l’avait vu faire. À chaque fois, elle amenait avec elle son chien, son berger Allemand Ayrton qu’elle ne pouvait se résoudre à laisser derrière elle parce qu’il la sentait et se mettait à pleurer comme si elle l’abandonnait. Jamais Aria ne pourrait se résoudre à se débarrasser de son chien, jamais. Il était sa seule source de bonheur depuis qu’elle avait compris qu’elle ne serait jamais vu que comme une fille, une simple femme bonne qu’à se reproduire.

Ayrton sur ses talons, elle continuait de sentir cette désagréable impression que des yeux la suivait, qu’on l’observait, qu’on la suivait du regard. Pour paraitre détendue, la jeune femme sortit son paquet de cigarette et en alluma une, la glissant entre ses lèvres dénuée de couleur. Elle rangea le paquet dans sa poche mais garda le briquer entre ses doigts, le faisant rouler entre ses phalanges. Elle ne savait pas qui était là et dans un sens, ça la stressait un peu. « Sors de là. Je sais que t’es là. » finit-elle par lancer, se maudissant d’être paranoïaque. Mais s’il y avait réellement quelqu’un, elle serait fixée et si elle était seule, elle se sentirait stupide l’espace de quelques instants avant de passer à autre chose. Ayrton se mit alors à grogner et Aria se tourna vers l’endroit qui semblait exciter son chien. « Si tu restes caché, j’ordonne à mon chien de t’attaquer. » La jeune femme ne blaguait pas et cette menace n’en était pas une lancée en l’air. Son berger Allemand était entraîné pour attaquer si sa maîtresse lui en donnait l’ordre. D’ailleurs, ses grognements redoublèrent quand une silhouette se détacha dans le noir. Aria ne parvint pas à identifier l’inconnu.e. Qui que cette personne était, elle allait vite goûter de la morsure de son chien si elle ne disait pas à la Fujiwara ce qu’elle faisait ici.

Une journée calme était quelque chose qu'il attendait avec grande patience. Yuise était bien heureux récemment, ou comme toujours, alors que son sourire ne quittait jamais ses lèvres, il était libre d'être lui-même, libre de se balader dans les rues d'Osaka jusqu'à qu'on lui dise de revenir chez lui, jusqu'à que cette liberté lui soit retirée. Il priait pour que ce jour n'arrive jamais. Cette impression de pouvoir être reconnu tout en pouvant sortir comme il le sent, il se sentait privilégié, oubliant les chagrins récents de sa vie. Aujourd'hui encore, alors que le soleil avait régné pendant toute la journée alors que les nuages se réunissaient en fin de journée, rendant le temps plus frais, les ombres plus présentes, les rencontres plus étranges, dangereuses. L'appel de l'inconnu, la curiosité rongeant sa peau, il était coupable de ce péché, et il ne comptait pas le réparer, peu importe ce que tout le monde pouvait lui dire. Il ne faisait que marcher dans les rues d'Osaka, le visage un minimum caché par un masque, accompagné d'une tenue des plus confortables, sweater et jeans, rien qui ne pourrait le rendre reconnaissable, il errait dans les rues, l'esprit et les pensées vides, appréciant le silence autour de lui.

Placer à l'ombre, hors des vues des plus ignorants, portable en main, le son de pattes sur le gravier fit relever ses yeux, ne quittant pas la petite rue dans laquelle il s'était logé, regardant pourtant le canin avec assez d'insistance. Il ne lui voulait rien de mal, Yuise avait un faible pour tous les animaux qui pouvait exister dans ce monde, bien qu'il n'était pas toujours le plus doux avec eux, qu'il ne connaissait pas toujours les meilleures façons de les approcher, il ne faisait qu'observer la beauté d'un chien qui était en bonne santé, bien entretenu, en forme, un chien dans toute sa grandeur. Seulement, il semble que ce regard insistant fut trop pour le chien en question, commençant à aboyer en sa direction, grognant devant l'inconnu qu'il était. Les paroles de sa maîtresse furent ce qui l'étonna le plus pourtant, comme s'il était ici depuis longtemps, comme s'il était nocif, dangereux, des mots qui n'allaient en aucun cas à Yuise, mais sa gentillesse était souvent vu comme fausse, comme un homme qui cachait ses intentions. Il sortit donc de sa petite ruelle, les mains en l'air comme si on venait de le menacer d'arme à feu, voulant montrer à la femme et son chien qu'il ne voulait rien de mal. « Excusez-moi, je ne voulais pas vous faire peur. » Restant à une certaine distance, voyant que le beau berger allemand restait en position protectrice de sa maîtresse, baissant lentement ses bras. « Est-ce que mon regard était trop insistant ? Si oui je m'en excuse, vous avez juste un très beau chien et... Je ne m'en suis pas rendu compte. » Naïveté qui le tuerait un jour, alors que ses yeux parlaient probablement bien plus que lui, étoiles dans les yeux alors que les grognements ne s'arrêtaient pas, il ne voyait qu'une beauté de la faune de cette Terre, et rien de plus. « Hmm, est-ce que vous pouvez lui demander de se calmer ? » Ou est-ce qu'il restait encore trop suspect pour elle ?

Même hors de la vue de sa famille, de son père, Aria avait la désagréable sensation d’être suivie, d’être observée. C’était clairement handicapant parce qu’elle avait réellement l’impression que ses moindres faits et gestes étaient passés au peigne fin et qu’elle n’avait le droit de ne rien faire, que d’attendre que ça passe. Mais, c’était mal connaître la jeune femme. Elle ne se laissait pas marcher sur les pieds et il était hors de question qu’elle laisse la personne lui faire peur, si c’était son but, ou pire. Aria n’aimait pas penser au pire, mais heureusement, aujourd’hui, elle était accompagnée de son chien Ayrton qui gronda dans la direction de l’inconnu. Rassurée de l’avoir près d’elle, Aria héla la personne. Elle l’aurait également fait si elle avait été toute seule, mais avoir son berger allemand à ses côtés lui donnait un peu plus de poids. La jeune Fujiwara lui demanda de sortir de sa cachette avant de lâcher le chien sur lui pour l’attaquer.

Quand il se révéla, Aria fronça les sourcils en le voyant lever les mains comme un criminel. Essayait-il de gagner sa confiance en se montrant sans défense avant de s’en prendre à elle ? Elle n’aurait pas le dessus physiquement sur lui, c’était sûr. Mais peut-être qu’avec Ayrton, elle aurait peut-être une chance. Aria le regarda bouger et parler, tentant d’enregistrer ce qu’il disait tout en gardant son chien près d’elle. Ayrton était assez bien élevé pour ne pas attaquer sans l’ordre de sa maîtresse et il restait à côté d'elle, grognant toujours. « Ayrton, couché ! » lança-t-elle, quand le jeune homme lui demanda de calmer son chien. Avec un couinement, il prit position, les oreilles en avant, prêt à bondir dès que Aria aurait donné l’ordre. Elle posa son regard quelques secondes sur son chien avant de le reporter sur l’inconnu. « Ça t’arrive souvent de de te cacher et d’espionner les gens ? » Aria darda son regard sur lui, passant une main dans ses cheveux pour enlever les mèches rebelles qui lui obstruaient la vue. « Qu’est-ce que tu fais là ? Tu me suis ? » Est-ce que c’était son père qui l’envoyait pour avoir une nouvelle fois un rapport des faits et gestes de sa fille ? Ou alors, était-elle devenue tellement paranoïaque qu’elle voyait le mal partout. Il pouvait simplement se promener comme n’importe qui. Mais Aria n’étant, malheureusement, pas n’importe qui, elle ne pouvait pas se permettre de baisser sa garde et de se montrer moins méfiante. Un faux pas et elle devenait une cible de choix pour les ennemis de sa famille.

Il n'était vraiment pas le plus discret, et surtout le plus doué des hommes que l'on pouvait croisé. Il comprenait que ceci lui soit arrivé plusieurs fois, surtout dans l'accoutrement qu'il a pu avoir, cachant son visage et des habits plus que confortables, il n'était pas étrange qu'il n'attire pas la confiance à beaucoup de personnes. Ce n'était pourtant pas pour attirer la confiance de qui que ce soit qu'il était sorti, seulement pour respirer, profiter de la ville alors qu'il ne pouvait pas sortir tous les jours sans son masque. En particulier dans des zones aussi recluses, des zones où il n'avait pas l'habitude d'allait, il ne pouvait pas porter à grande confiance. Il comprenait alors la façon de réagir de la jeune femme, ainsi que de son beau chien, de vouloir protéger son maître coûte que coûte. Et pourtant, alors même qu'il agissait comme s'il allait être arrêter par la police, les mains en l'air, se montrant sans défense comme il était réellement, rien que de voir ce beau chien couinait après l'ordre de sa maîtresse, il ne put s'empêcher de vouloir juste lui toucher le museau, caresser sa tête et lui dire qu'il était un très bon chien. Mais dans la position dans laquelle il était, il était probablement plus approprié de rester à quelques distances. Et surtout de demander avant de faire quoi que ce soit.

Les questions de la jeune femme le prirent pourtant de surprise, notamment sa première question pouvait sembler compréhensible avec la première impression qu'il avait donné, mais la seconde ne fit que lui prouver quelle image il donnait de lui ainsi. Yuise baissa alors ses bras le temps de retirer le masque qui couvrait son visage, le rangeant dans une poche de son sweater. « Je ne voulais vraiment pas donner cette impression, excusez moi... En réalité, je ne voulais que passer un court moment au calme avant de voir votre chien et... Disons que mon amour pour ses petites bêtes de poil a probablement pris le dessus sur mes bonnes décisions. » Il sonnait si poli, trop poli, mais c'était pourtant la vérité, l'envie d'être tranquille qui fut oublier par la présence d'un canin qu'il trouvait adorable, la vie était si compliqué quand on devait expliquer l'amour des canins à une personne qui voyait tout une autre chose. « Et non je... ne vous suis pas, je ne vous connais pas et je n'oserais jamais faire une chose pareille... Peut-être que me présenter aidera. » Se redressant légèrement, lui adressant un sourire doux comme à son habitude, la naïveté de l'acteur sortit à nouveau alors qu'il prit quelques pas vers l'avant, s'approchant de la jeune femme sans pour autant s'arrêter tout juste devant elle, toujours à quelques pas d'elle, distance de sécurité. Il tendit pour autant sa main, nue, comme pour la saluer de la façon la plus polie qu'il puisse trouver. « Je m'appelle Yuise, et vous ? »

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