⌜ost ,,⌟

She wore blue velvet
Bluer than velvet was the night
Softer than satin was the light
From the stars

Démons de ces nuits injustice, raison s'égare dans les brumes couleur d'étoile, à l'affût des beautés d'un monde qu'on chercher pourtant à dissimuler. Magnolias qu'on cultive sans soleil, et elle se demande, sous ses yeux à elle, de quelle couleur se dessinent les courbes de ces nymphes aux regards assassins. La liqueur brûle ses muqueuses, il y a longtemps qu'elle ne s'est pas laissé choir dans les vices de l'alcool, car elle est malade, Rain, mais depuis que le monde dans lequel elle a grandi semble s'écrouler, les phases de sa réalité se sont inversées. De pas assez, elle passe à trop, et lorsque les têtes sont tournées, c'est seule qu'elle s'aventure dans les enseignes alimentaires, attrapant ce qui lui passe sous le nez pour l'avaler sans se contrôler, et elle finit toujours, par tout recracher.

Il y a ceux qui se plaignent et ceux qui ont peur de le faire, Rain est de la deuxième trempe, et ça ne l'empêche pourtant pas d'effrayer son prochain. Assise, là où on ne devrait pas la trouver, elle s'est échouée, sirène, loin de son palais, car plus le temps passe et plus la jeune femme comprend que ces diamants ne sont pas les paillettes dont elle a toujours été si fière. Elle est tiraillée gamine, instable sur la balance de la morale. Son père se sert de ceux qui sont comme elle, il joue avec les pires penchants de cette société macabres, entretenant les folies de ceux qu'on a privé d'une vie plus simple en cultivant des idées extrémistes. A-t-elle déjà ressenti le besoin de s'en prendre à des probes ? Non, pas même depuis qu'Hotaru est entrée dans sa vie. Elle se surprend, souvent, à se demander de quelle manière les choses sont faites, et alors, elle se met à penser à elle plus qu'elle ne le devrait. C'est pour toutes ces raisons que l'aînée des Im se trouve ce soir, là où elle ne devrait pas, à scruter les courbes d'une des filles de l'Okiya, les verres de saké vides s'empilant près d'elle tandis qu'elle sait pertinemment qu'elle vomira une fois sortie de cet endroit.

Assise négligemment au fond de la salle, la chemise entrouverte, le coude reposant sur un genou tandis qu'elle appuie sa tête contre la paroi, elle suit les vas et viens de celle qui semble la plus prisée. Rain n'a pas l'habitude de ce genre d'endroit, mais elle s'y sent étrangement en sécurité, loin de sa famille, de sa sœur, de ceux qui attendent d'elle une posture parfaite. Les joues rouges, les cheveux en bataille, elle n'a rien de la Rain rigide et exigeante qu'elle laisse transparaître la plupart du temps, en revanche, elle conserve son caractère rabat-joie, refuse quiconque se présente à elle depuis qu'elle a posé pied sur ce terrain, il n'y a qu'une seule perle qu'elle souhaite ajouter à son collier, la plus rare, la plus chère, celle qui semble trop précieuse pour croupir dans un endroit pareil. Ses yeux s'ancrent enfin dans les siens, d'un effort qui lui paraît surhumain, elle se redresse, pose son verre sur le tatami et étire ses lèvres dans un sourire.

« Accorde-moi un entretien. »

She wore blue velvet
Bluer than velvet were her eyes
Warmer than May her tender sighs
Love was ours

⌜ost ,,⌟

No problem. Try to destroy it.
Hold me tight.
The taste of trauma with strong opposition.
Sit down and I’ll give you a big reward

Si véritable prison pour ceux qui sont enchaînés ici, l'établissement est une grotte aux vices et réconfort aux solitaires pour tout ceux qui y mettent les pieds en tant qu'invités. On se laisse allez, on tombe amoureux des regards des malheureuses et on se sent important. On prend des airs de sauveurs alors qu'il n'y a rien à sortir de la misère. On promet de revenir demain, après-demain et tous les jours qui s'en suivent. On se ruine pour quelques demoiselles qui se souviennent de nos visages par simple automatisme. C'est un amour à sens unique qu'elles utilisent pour ne pas finir noyer par les horreurs qu'elles offrent.

En dehors des prisons en verre où elle s'expose comme un trophée décadent, là où elle imite les pires indécences, en dehors des rendez-vous privés où l'on s'est ruiné pour pouvoir toucher ses lèvres et découvrir les parcelles de sa peau, Danbi s'occupe de flâner dans les couloirs et différentes salles communes de l'Okiya. Puisqu'elle n'est pas de corvée, n'a pas à offrir des spectacles de kimono à ceux qui espoirs voir des cuisses révélées dans des vêtement trop traditionnels, la demoiselle se balade sur ses talons et sa jolie robe d'un tissu noble qu'elle ne connaît pas: un cadeau d'un habitué qui ne cesse de cracher son argent pour elle. Danbi vole les attentions de ceux qui sont venus pour une autre dans une fausse innocence, elle sourit et ses lèvres rosées captent directement l'attention. Dans un ennui qui grandit vite en elle, elle décide de rejoindre l'une des salles où le bruit raisonne contre les murs. Les humeurs semblent plus enjouées et les verres ne cessent de recouvrir les tables. Les habitués autorisés ont déjà une demoiselle dans leur bras et les autres se font rappeler à l'ordre par les armoires à glace qui servaient de sécurité quand ceux-ci laissaient aller leurs mains baladeuses.

Dans la pièce des horreurs, ses yeux se plissent dans un dégoût qu'elle ne laisse pas vraiment paraître. A la place, le sourire décore de nouveau ses lèvres quand sa présence est finalement remarquée. Elle préfère qu'on pose les yeux sur elle, a cultivé ce besoin d'être vue comme un bijou à protéger ou à admirer. Dans l'ivresse qui met les hommes en joie, elle ne remarque pas l'anomalie du paysage. On la prend à part, lui demande si tout va bien et elle n'a pas le choix que de répondre de ses grands airs. Au milieu du bordel, Danbi a l'air gracieuse et on se demanderait ce qu'elle fait là. Ils sont nombreux ceux qui lui ont dit viens on s'enfuit d'ici et qu'elle a toujours refusé. Quand les mains se détachent de sa taille, son regard peut enfin balayer la pièce d'un simple regard. Elle reconnaît les filles, certains clients, puis l'anomalie. Un désastre inconnu que personne n'entoure. Elle n'avait pas en mémoire une nouvelle femme qui avait rejoint l'enfer et il était rare de voir de la clientèle féminine car milieu rempli d'une misogynie qui arrange tout le monde. Quand ses yeux trop précieux tombent dans les siens trop abîmés, ses sourcils se haussent et ses lèvres s'étirent dans un sourire de politesse. Elle l'observe lutter pour mouvoir son corps et sans modestie, elle sait très bien qu'elle l'approche elle et pas une autre. Danbi n'a jamais été contre l'idée d'apaiser le coeur d'une femme.

- J'espère que vous êtes au courant des prix. elle souffle, le ton taquin mais sans méchanceté. Les tarifs variaient selon la popularité et Danbi en tant que poule aux oeufs d'or était source de beaucoup de comptes bancaire dépouillés. Elle n'avait aucune idée que la demoiselle face à elle était une figure importante et toute la maison close était dans le même cas. Alors l'un des agents de sécurité plisse des yeux face à la demande qui lui semblait soudaine mais Danbi agite doucement sa main vers l'homme qui se tenait debout dans le coin de la pièce. - On y va ? elle demande alors que ses bras s'enroulent comme des serpents autour du sien, quittant les débordements d'ivresse. Plus loin dans ce long couloir, Danbi l'entraîne là où elles pourraient être seules. Du bout des doigts, elle pousse une porte pour laisser entrer la plus grande; on aurait dit un petit salon de maison traditionnel si on ne prêtait pas attention aux deux caméras au plafond. La femme laisse sa future cliente prendre ses aises, refermant derrière elles. - C'est votre première fois j'imagine ? elle demande dans un semblant de curiosité. - Vous avez l'air épuisée.. quand elle s'approche, ses doigts vinrent sans permission dresser la chevelure de la brune, pour la passer derrière son épaule. Si les contacts étaient très réglementés quand il s'agissait des clients, certaines filles semblaient faire ce qu'elles désiraient.

No problem. Try to destroy it.
Hold me tight.
The taste of trauma with strong opposition.
Sit down and I’ll give you a big reward

⌜ost ,,⌟

Ours a love I held tightly
Feeling the rapture grow

Des caprices elle n'en fera point, car ce n'est pas dans sa nature à elle, de venir se plaindre ouvertement pour rien. Les peaux frémissent dès lors que les contacts s'instaurent, sous l'œil faussement discret de la panthère. Elle se tient toujours aussi droite lorsqu'elle est debout, Rain, comme si on avait planté un barreau de fer dans sa colonne vertébrale, et c'est là que réside toute la beauté de la future ambassadrice, un coup d'œil suffit pour comprendre qu'elle n'est pas de ces gens qu'on plie facilement. Échine sensible pourtant lorsque les doigts d'une nymphe explorent son corps, elle brûle d'une envie dévastatrice, mais elle est au courant des politiques, ainsi, c'est dans les poches de son pantalon tailleur que ses menottes resteront, à l'abri de la tentation. « Le prix n'est pas un problème. » Glisse-t-elle sans arrogance, plus blasée qu'autre chose, car elle n'est plus certaine de la provenance de cet argent. Combien de monos ont été exploités pour remplir ses poches à elle de jolis billets ?

Son regard bascule sur le garde qui les observe, sans bouger la tête, elle marque une pause tandis que l'autre l'invite à s'éloigner. Combien de gros bras pour servir ces filles-là ? Peu importe le rang ou l'importance, être une femme dans ce monde, ça revient toujours au même. Elle est contente de s'être débarrassée de ses chiens à elle, de lui, plus particulièrement, qui l'oppresse plus qu'il ne la protège. Cette pensée pour Jian a le don d'éveiller des sentiments déplaisant, elle revient à la réalité et pose ses iris sur la déesse qui la tire vers un couloir. Elle enjambe quelques corps saouls, bute dans le coin d'une table basse, mais ne perd pas son équilibre. Le couloir est sombre, étroit, presque effrayant, elles longent les murs de papier et finisse par traverser la porte coulissante d'une pièce reculée. Désormais, face à la sirène, Rain prend le temps d'inspecter les lieux, laissant courir son regard sur les détails de leur environnement. Les caméras la font tiquer, elle se dit qu'il faudra qu'elle soudoie l'un des espions de l'ambassade afin de faire disparaître les fichiers compromettants. Image publique à entretenir, on ne peut pas l'avoir vue ici.

La voix de la belle parvient à ses oreilles, Rain baisse le menton et surprend la jeune femme à quelques centimètres d'elle. Ses doigts viennent s'approprier sa chevelure, ballet séducteur qu'elle entretient face à celle qui ne semble pas un brin impressionnée. « Je suis obligée de te parler de ma vie ? » Répond-elle doucement, le ton volontairement évasif. D'une inspiration, elle recule, instaure une distance qu'elle ne gardera pas longtemps. « Vous avez raison sur un point, je ne suis pas familière de ce genre d'endroit. Dites-moi donc comment tout cela fonctionne, quels sont mes droits et mes interdictions ? » D'un pas lent mais assuré, elle se met à arpenter les lieux, laissant son doigt courir le long des reliefs. Elle vient alors se positionner dans le dos de la concubine, glissant ses mains dans le creux de ses bras, la serrant contre elle tandis qu'elle s'abandonne à l'ivresse de son parfum.

« I could devour you right here, right now. »

Like a flame burning brightly
But when she left, gone was the glow

⌜ost ,,⌟

It's for all the right reason, baby
don't care 'bout grades

Presque amusée par la figure qu'incarnait cette inconnue, elle la laissa alors assurée qu'elle pouvait payer le prix de sa jolie voix et de ses beaux sourires. Elle n'avait ni l'air habituée par ces endroits et pourtant ne semblait pas embarrassée pour autant. Danbi avait l'habitude des timides, ou ceux qui osaient sans savoir, des têtus qui voulaient quand même laisser aller leurs mains baladeuses sous les tissus et ceux qui laissent des constellations quand la colère monte. A ses côtés, il ne semblait y avoir rien de tout ça alors une fois seules, elle la laisse se familiariser avec l'espèce. Et comme la poupée qu'on espère qu'elle soit, elle n'a pas bougé quand elle a reculé. Ses sourires s'affinent alors qu'elle fait mine hausser les épaules, comme si pas grand chose l'importait. Si la brune ne voulait pas partageait les craintes et les doutes qui l'écrasaient, Danbi pouvait être bien d'autres choses. Elle s'accordait au désir des autres, faisaient en sorte de leur plaire et de rester dans son statut de sacré sainte: on se brûlerait à la toucher. Elle veut qu'on voit en elle l'objet de fantasmes inatteignables, qu'on crache à genoux pour espérer des attentions sincères.

- Vous n'êtes pas obligée non, je peux être autre chose que votre confidente. elle répond et la douceur dans sa voix possède ce quelque chose d'horriblement malsain à force d'être enchaînée à ces murs ignobles. Ses sourcils se haussent à sa demande. - Vous pouvez venir autant de fois que vous voulez et vous êtes facturée à l'heure et à la boisson. des règles qu'elle connaît trop et pourtant sa voix chante presque alors que ses yeux ne quittent pas la demoiselle. - Vous avez la possibilité de planifier à l'avance des entretiens avec une des filles si elles sont disponibles, le prix dépend de chacune. Si vous voulez couchez avec l'unes d'elles, ce ne sera pas possible dès les premières fois. car il faudrait toujours s'endetter ici pour avoir le privilège d'écouter plaintes saintes des anges. Danbi préférait être directe sur ce genre de sujet, imposer ses barrières tout en laissant l'espoir d'y trouver une fissure pour les dépasser. -  Vous..

Les bras autour d'elle sont une habitudes qu'elle pourrait détester parce qu'ainsi, elle n'a pas la totale liberté de ses mouvements. C'est comme les mains trop brusques qui obligent à garder les bras au dessus de sa tête. Tout lui revient en écho à ces moments où son corps s'active seul pour qu'elle ne vive pas ses moments complètements et qu'elle n'en garde aucun souvenir. Même s'il y avait quelque chose de sensuelle dans les chemins que tracent les doigts pour arriver à leur fin, Danbi les trouvait d'une addiction dégoûtante.

- Vous n'êtes pas supposée faire ça. elle reprend, l'amusement entendu dans sa voix. Avec le temps les règles les plus simples sont passés à la trappe et sont illustrés sous forme de chiffres en plus sur la facture. - Mais personne ne dira rien, alors.. et dans ses bras, Danbi s'agite, simplement histoire de se tourner et de se retrouver face à ce visage qui ne lui disait rien et qui paraissait trop princier pour avoir eu l'idée de venir dans ces caves. - Est-ce que tout est clair pour vous ? son regard plongé dans le sien, c'est dans un murmure car les visages trop proches qu'elle demande. - Vous ne m'avez pas dit votre prénom. comme des serpents, ses doigts glissent sur ses avant-bras, en dessinent les traits.


Just call me your lady.
Will you give me your babies ?

⌜ost ,,⌟

Blue velvet

Briseuse de ces silences royauté, à faire monter la tension en même temps que l'autre, c'est que son visage semble façonné par les dieux, sa peau issue des plus doux nuages du firmament, à n'être que l'incarnation du désir entre ces murs crasseux. Pourrait-elle poser un regard dénué de perversion sur elle dans des circonstances plus glorieuses ? Rain en doute, sûrement se serait-elle arrangée pour l'approcher de la même manière. Sous la carapace perfection de la politicienne se cache le regard bestial d'une âme de pouvoir cherchant à satisfaire ses besoins. Et même si elle voudrait se convaincre qu'elle est mieux que les autres, elle ne sauvera pas la demoiselle dans ses bras ce soir, car sa vie ne la regarde pas, c'est en démon tentation qu'elle lui apparaît et qu'elle se contentera de la regarder.

« Je vois... » Répond-elle simplement, suite aux explications du diamant. D'une main qui glisse en bas des dos si fragiles, elle voudrait la priver de ses habits, mais les règles sont les règles, et Rain n'est pas de ceux qui se fichent de ces dernières. On pourrait la prendre pour ces princesses à qui on ne refuse rien, et peut-être l'est-elle parfois un peu tout de même, mais globalement, Rain est une bonne enfant. « J'imagine que je vais tout de même devoir me déballer devant vous ce soir alors. » Soupire-t-elle, car elles ne vont pas s'asseoir l'une en face de l'autre et se regarder dans le blanc des yeux. La jeune femme se tourne dans ses bras, Rain ne moufte pas, elle fait tomber son regard sur les lèvres maquillées de la belle, cherche inconsciemment à se souvenir de ce rouge si particulier qu'elle a put observer sur celle qui a le pouvoir de lui offrir les vérités du monde. Elle glisse une main sous le menton de la rose, trace le chemin de ses lippes en entrouvrant les siennes. Une inspiration, elle redresse son regard et le plante dans les iris de son interlocutrice. « Commençons par laisser tomber les politesses, mh ? »

Elle sourit, de ce sourire révélateur, de ses ardeurs. La pièce est plongée dans une ambiance à la lumière tamisée, la condition de Rain fait qu'elle voit moins bien dans des lieux peu éclairés, mais cela ne l'empêche pas d'être sensible à ce genre de mise en scène. La femme dans ses bras s'agite et vient lui demander son prénom. La Coréenne hésite un moment, elle reste sur ses gardes, car elle n'a pas l'habitude de ce genre d'endroit. Après un échange de regard que la politicienne s'amuse à faire durer elle finit par lâcher le corps de la concubine, relevant un œil rapide vers les caméras. Si elle veut profiter de ce moment comme il se doit, elle doit les oublier, oublier tout ce qui la retient de se livrer. « Rain. » Elle se concentre à nouveau sur la belle. « Et toi ? »  Elle sourit maigrement et fait un mouvement de la tête en direction des portes. « Peut-on nous apporter de quoi boire ? »


But in my heart there'll always be
Precious and warm, a memory

⌜ost ,,⌟

I feel a tingle in the back of my throat.
I’m throbbing

Elle semblait docile ou du moins compréhensible, la princesse. Danbi s’était habituée à ceux qui faisaient les yeux doux pour espérer passer entre les barrières imposées, ou ceux qui forçaient leurs gestes dégoûtants. Elle pourrait être déçue qu’elle comprendrait. Le temps et l’argent dépensés pour espérer se souvenir des courbes des anges étaient trop démesurés, c’était simplement pour condamner les plus désespérés.
Ses yeux se plissent pour accentuer son sourire amusés. Si en face, elle avait ce côté très sérieux, elle semblait bien loin des hommes d’affaires qui viennent lâcher prise. A y réfléchir plus sérieusement, elle n’avait tout simplement rien à avoir avec tous les clients qu’elle a pu croiser jusqu’à présent. Elle ne pouvait cacher que ça avait quelque chose de particulièrement plaisant, c’était comme redécouvrir les choses.

Danbi l’écoute parler, comme toujours et l’air de rien ses doigts remontent le long de ses bras afin que les siens s’enroulent autour de son cou. Sans rien faire de plus. Elle hoche simplement la tête, laissant la plus jeune retracer la courbure de ses lèvres, à trop les fixer ses yeux vinrent se plonger dans les siens. Il était souvent venu aussi, le temps où on pensait qu’elle serait l’espoir salvateur à redonner les éclats d’une vie monochrome. Sans trop le cacher, elle les trouvait particulièrement pathétiques à croire que ce serait une raison suffisante pour qu’elle s’arrache de force à son royaume. Mais dans les yeux de cette inconnue, il n’y a rien, pas un espoir de voir des couleurs de la part de la belle, et ça lui retire un poid au coeur.

- C’est ce que vous voulez ? Tu n’avais pas l’air enchantée tout à l’heure. elle répond en laissant tomber le trop de politesse comme voulu. Elle comprenait que l’intimité de cet endroit pouvait donner des sons étranges aux formalités.

La femme laisse Rain s’échapper de ses bras et ces derniers retombent le long de son corps. Elle a remarqué les regards envers les caméras de sécurités, les peurs d’être affiché sur tous les murs d’Osaka, ils étaient beaucoup à douter.

- Question sécurité, j’espère que tu comprends et que ça ne te mettrait pas plus longtemps mal à l’aise. Il n’y a pas de micro si ça te rassure. elle souffle dans un léger sourire. - C’est joli, Rain. Ce n’est pas japonais j’imagine ? Moi c’est Danbi. elle hoche la tête, d’une politesse parfaitement apprise. - Bien sûr. la demoiselle tourne les talons et face à la porte, ses phalanges frappent contre les murs fins avec une douceur qui suffit à alerter l’agent de sécurité devant la porte. Elle était ouverte juste assez, il est difficile de discerner le visage de l’homme. Les murmures se font entre eux et Danbi n’a même pas le temps de retourner auprès de Rain que le plateau est déjà entre ses doigts, comme si tout était déjà prévu. La porte est refermée derrière elle par l’homme et la voilà, le pas dansant, revenir vers elle, déposant le plateau sur la table basse. Il y avait une bouteille de saké et un verre prévu pour. Danbi ne buvait pas, pas quand elle travaillait en tout cas. Elle se mit alors sur ses genoux pour s’installer et tapota doucement la place à ses côtés, relevant les yeux pour apercevoir le visage de celle encore debout. - Alors ! Pourquoi ce beau visage fini ici, mh ? à vouloir de l’attention des plus dégoûtantes. D’un geste maîtrisé, elle vient remplir le verre de Rain.


Show me your heart pulled out of your chest
It feels good.

⌜ost ,,⌟

And I still can see blue velvet
Through my tears

De ces yeux qui semblent avoir trop vécus, elle observe la silhouette de la belle se mouvoir avec aisance dans cette pièce étroite. Tout est si ordonné, anticipé. Cage dorée, combien de personnes Danbi a ainsi servi, avec le même regard, le même sourire, les mêmes gestes et les mêmes paroles ? Rain sait pertinemment qu'elle n'est pas exception, et ce n'est pas pour se sentir importante qu'elle est ici ce soir, au contraire, elle cherche à descendre de sa tour d'ivoire, s'éloigner de ce quotidien à l'image trop parfaite, en espérant trouver quelque chose de réconfortant. Qu'elle ne peut pas non plus dire qu'elle se rapproche des bonnes gens, car ici ne traînent que les riches aux fortunes gaspillées, à la recherche de ce quelque chose qui saura les motiver. Rain n'est pas bien différente, à l'exception que c'est une femme, elle sait se tenir sage dans des endroits où il serait si simple d'oublier ses manières et sa politesse.

Une de ses mains a rejoint la poche de son tailleur. Elle sourit face aux liqueurs, vient prendre place face à la courtisane, fesses à terre, car elle ne trouvera pas l'équilibre de se dresser sur ses genoux. « En effet, mes parents sont Coréen, moi aussi, par extension. » Elle en revient aux échanges si conventionnels, ceux qu’elle répète à tous ceux qui croisent son chemin, sans savoir par quoi commencer. « Danbi ce n’est pas Japonais non plus… » Souffle-t-elle dans un murmure en tendant son verre à la poupée. Sa tête lui tourne, agréablement, dans cette envie de se détendre, elle s’appuie sur son bras qu’elle a posé derrière, redressant un genou tout en gardant son autre bras tendu. Elle récupère son verre et l’avale d’une traite. « Je me demande bien… Ce qu’une fille comme moi peut avoir à foutre dans un endroit comme ça. » Commence-t-elle en souriant, ses yeux fixant la surface de la table. « Chercher du réconfort ? C’est niais. Je pense que j’ai besoin de me prouver que je ne suis pas seulement la fille parfaite que je m’efforce d’être, que, peut-être, je suis capable moi aussi d’aller voir dans les coins sombres de ce monde. » Elle redresse lentement son regard vers celle qui semble trop belle pour croupir dans cet endroit macabre. « Je ne suis pas vraiment différente, finalement, de mon père, je veux dire, ou de tous ces gens qui se croient supérieurs parce qu’ils ont de l’argent et qu’ils voient les couleurs. » Elle laisse sa parole en suspens, s’attarde sur le visage délicieux de son interlocutrice, avant de laisser retomber sa tête alourdie par les liqueurs. « C’est plutôt une bonne chose finalement… Je crois ? » Car s’il y a une chose qu’elle demande, Rain, c’est d’être traitée comme une égale, malgré ses différences. « Je me demande à quoi aurait ressemblé ma vie si je n’avais pas atterri dans cette famille… » Continue-t-elle sans vraiment réfléchir à ce qu’elle raconte, laissant simplement ses pensées intrusives parler pour elle. Elle ne pense pas souvent au fait qu’elle a été adoptée, sauf quand sa sœur s’autorise à le lui balancer à la figure, dans l’espoir de la briser. Elle préfère le refouler, loin, ne pas imaginer, ne pas se demander, et peut-être redouble-t-elle d’effort au sein de cette famille, pour combler le fait qu’elle ne soit pas véritablement reliée, pour leur prouver qu’ils ne se sont pas trompés en portant le choix de leur adoption sur elle, pour prouver à Rael qu’elle a tort de s’acharner ainsi sur elle. Rain soupire, demande qu’on remplisse à nouveau son verre. « Qu’est-ce qui se passerait s’ils décidaient qu’ils n’avaient plus besoin de moi ? S’ils décidaient que j’étais devenue un trop gros poids pour eux ? » Elle serre les lèvres, attend d’avoir été servie avant de porter à nouveau son verre à sa bouche. « That could happen… Maintenant que l’information à fuité, ce n’est qu’une question de temps avant que la famille entière soit au courant, et après… Ça sera rendu public ? Est-ce que je risque de me faire évincée et exilée ? Mon père me dira que c’est pour mon bien, il m’enverra en Corée vivre avec une tante, histoire de me protéger. Et Rael… Elle rira de moi, avec son regard de sorcière, j’en ai des frissons rien qu’à l’imaginer. » Monologue aux airs de déprime, qu’elle ne s’occupe même pas de savoir si l’autre comprend, car après tout, c’est pour ça qu’elle est là, non ? Pour écouter sans rien comprendre et rassurer les gens dans leurs crises existentielles, pour prendre le parti de ses clients, peu importe les crasses qu’ils ont faites.

⌜ost ,,⌟

Play-biting each other
Warmth-giving each other,

Eclatante d'une joie de vivre qui va mal à ses murs dégoûtants, elle avait la chance de ne jamais vraiment s'ennuyer du moins c'est ce qu'elle se forçait à penser. Même si elle répétait les mêmes paroles, les mêmes sourires ou les mêmes attentions, la réaction en face était différente que ce soit le trait du sourire, les rougeurs des clients embarrassés par les contacts chastes, il fallait qu'elle trouve quelque chose de satisfaisant dans ces échanges pour s'empêcher de leur arracher les yeux. Alors à genoux à côté de la jeune femme qui préférait ne pas se fier à son équilibre, Danbi lui offrit son regard quand elle lui répondit, déposant la bouteille d'alcool.

- Oh, vraiment ? elle mime les surprises avant de s'expliquer à son tour. - C'est aussi coréen, mais j'ai été adoptée, puis j'ai fini ici. c'est d'un ton léger qu'elle explique son triste sort, parce qu'avant le Velvet Pearl, il n'y avait plus rien. Passé effacé, amnésie volontaire pour planter plus facilement ses racines dans ce jardin macabre.

Et commence les grandes histoires dont elle ne connaît rien. Il est vrai que ce n'était pas son travail de comprendre, ou même de jouer les confidentes. Danbi avait l'oreille attentive alors que son regard était rivé sur le visage de sa cliente, puis parfois sur son verre qui attendait simplement d'être rempli. Le dos droit, les mains déposées sur ses cuisses, elle se dit que ses problèmes semblaient à la fois si superficiels et en même temps trop compliqués pour être réglés facilement. Sûrement qu'il arrive un statut social, ou les peines et les angoisses ne sont plus centrés de la même manière. C'est égoïste, mais c'est qu'elle ne l'écoute presque plus quand elle se dit qu'elle aussi, elle aimerait avoir peur de savoir si elle allait rejoindre une tante qui n'existait pas ou non.  Quand elle reposa de nouveau la bouteille, ses doigts glissèrent le long du dos de Rain, remontant jusqu'à sa chevelure pour jouer avec dans une délicatesse qui lui était propre.

- Ca m'a l'air bien compliqué.. donnant son opinion sans qu'il ne soit demandé. Danbi se penche légèrement en avant, comme pour mieux capter le regard de la plus jeune. - Tu es obligée, de rester auprès d'eux ? elle demande dans une innocence accablante.

dans les jardins de mon enfance,
entre les arbres et la violence

Parce que dans le monde de Danbi, tout est plus facile à l'extérieur. Si on a pas les chaînes au cou, on peut laisser nos pieds chatouiller cette herbe qui signifie liberté. C'est ce qu'elle aimerait demander à tout ceux qui viennent pleurer sur son épaule; patron affreux, femme et enfants indifférents, collègues étouffants, pourquoi tu te casses pas ? mais rien ne s'échappe de ses lèvres de manière aussi dure. A la place, elle préfère doucement se rapprocher de celle qui a demandé sa présence, ses jambes glissant contre le sol et les épaules s'effleurent l'air de rien.

- Ou, tu as envie de rester avec eux ? au-delà des obligations.

That is probably an amazing thing
Even this makes you happy right?

⌜ost ,,⌟

There's something about you
It's not that I doubt you

Les problèmes d'une vie si légèrement partagés au sein de ces murs encrassés, car c'est dans ce genre d'endroit que les secrets les plus noirs atterrissent, minutieusement gardés par les oreilles de ces femmes aux pouvoirs si déroutant. Elles sont femmes et renardes, femmes enchaînées, femmes qu'on désir, femmes gardiennes des pires déboires, et la vérité, c'est que Rain ne vaut certainement pas mieux que n'importe quel homme venu demander de l'attention à celles qui font semblant d'écouter.

La politicienne ricane lorsque l'autre vient répondre si simplement à toutes les vilaines pensées de sa tête, ces angoisses qui doivent lui paraître bien futiles, mais qui sont la source de son mal-être à elle. « J'aimerais pouvoir me poser la question, oui... » Répond-elle, évasive, ses prunelles à nouveau captivées par la beauté de sa compagnie. Tout autour, la pièce lui apparaît floue, évanescente, telle un rêve, les effets d'une consommation d'alcool qui ne semble pas s'arrêter. « Il y a un dicton... Mh... Qu'est-ce que c'était déjà... Ah oui : With great power, comes great responsabilities. Tu comprends un peu l'anglais ? » Et elle n'émet aucun a priori sur les capacités culturelles et intellectuelles de son interlocutrice, mais les Asiatiques ne brillent généralement pas pour leur maîtrise incroyable de cette langue. « Ça veut dire que, de la même manière que tu es retenue ici, je suis retenue chez moi, il m'est impossible de quitter mes fonctions. » Elle sourit maigrement en laissant son regard courir le long de la nuque de la belle, jusqu'au niveau de sa poitrine.

Tentation exquise, qu'elle voudrait la goûter, mais elle a toujours su faire preuve d'une grande maîtrise. Elle bascule vers l'arrière, abandonnant son verre sur la table basse pour prendre appui sur ses bras. D'une attitude qui paraît négligée, il y a pourtant quelque chose de terriblement provocateur dans sa manière de la regarder, et Danbi le lui rend sans trop de difficulté. « Ça ne te dérange pas ? » Souffle-t-elle, plus bas, comme pour encourager l'intimité. « Que je sois une femme. » Elle redresse le menton, sans quitter son regard, hypnotisée. « Il y en a beaucoup qui viennent ici ? » D'une curiosité qui ne lui apportera rien, elle vient tout de même mettre le sujet sur la table, car ça non plus, ce n'est pas une chose dont elle parle souvent. Rain a bien trop l'habitude de prendre et donner sans parler, sans réfléchir, suivant l'appel de ses désirs, préférant fermer les yeux sur des évidences qui lui semble inutile de nommer.

Angels circle around you
'Cause you shouldn't be on your own

⌜ost ,,⌟

Help me
make the most of freedom

Sans avoir le droit de même se demander si elle pouvait s’échapper, Danbi se dit que la belle est tout aussi enfermée dans un amas de crasse aux allures dorées pour au moins les amadouer. Peut-être qu’à elle aussi, on lui donne un semblant d’importance pour qu’elle puisse construire son royaume en château de carte, quelque chose de fragile mais qui prouve de sa patience et de sa détermination à garder la tête haute. D’un coup, Danbi a envie de la prendre dans ses bras et la noyer de baiser, du front jusqu’à sa chevelure à la cajoler pour lui dire que tout ira bien. Mais Danbi reste sur ses genoux, le dos droit et prend la peine d’écouter. Elle la regarde en battant des cils, même si elle était douée à l’école, on lui a coupé tout espoir de continuer en y sortant. Son niveau en anglais est tout aussi minable qu’une majorité, mais elle ne se sent pas plus stupide pour autant. Alors elle secoue simplement la tête avant que Rain ne tarde à un peu lui expliquer.

- Oooh.. Tu es quelqu’un d'important ? elle arrive à en déduire naturellement.

Puisque quand on vient ici, on est soit ruiné et on creuse sa tombe, soit trop fortuné à ne plus savoir ou cracher ses billets. Alors avec le temps, il était facile pour la jeune femme de trier les gens dans ces deux catégories. Elle accordait autant d’importance à l’une qu’à l’autre. Même les plus pauvres se tuent à lui offrir des cadeaux hors de leur portée qu’ils n’imagineraient même pas leur femme porter. Ils ont aussi ce côté pathétique qui les rend attachant et d’un regard ils se sentent importants et reviennent le jour d’après en aboyant.

La conversation s’échappe légèrement et elle l’observe prendre ses airs nonchalants sans aucune gêne, et ça ne la dérange pas. Un sourire se dessine même sur ses lèvres quand elle pose toutes ces questions. Elle garde cet instant de silence, regarde en l’air comme pour y trouver la réponse, puis revient sur Rain.

- Ca ne me dérange pas non. car elle est à ce niveau de royauté où elle peut se réserver le droit de choisir qui posera les yeux sur elle. Alors elle a accueilli Rain les bras ouverts sans être dégoûtée. - Tu es la première. femme à venir ici.

Peut-être que ça la rend un peu plus unique, peut-être que ça la rassure ou pas du tout, Danbi n’en sait rien. Appuyée sur sa main, la belle se penche vers Rain, juste assez pour que sa cascade brune tombe le long de son épaule, frôle en provocation le buste de sa cliente.

- Tu viens à peine d’arriver mais.. Est-ce que tu reviendras ? elle demande dans un semblant d’innocence. Il n’est pas habituel qu’elle soit aussi directe mais ça reste des paroles soufflées pour donner envie et faire gonfler les coeurs.


Cause nothing
last forever

⌜ost ,,⌟

I know that you need it
I think you should leave with me

Dans une symbiose inespérée, les myocardes s'enflamment et le désir fait des ravages. Trop ivre pour mesurer leur échange, elle en vient à se vider si simplement, d'une légèreté qu'elle n'avait pas soupçonnée en passant le pas de cette porte damnée. L'âme scellée de la prostituée, obligée d'écouter des récits qui ne la concernent pas, guidant les cœurs meurtris des pathétiques cherchant refuge là où l'amour ne sera jamais véritable. Elle est tombée bien bas, se dit-elle en écoutant la question de la concubine, et pourtant, sa vie est loin d'être finie. « Important pour qui ? Pour quoi ? » Répond-elle dans un élan de philosophie mal venue. « On est tous importants à son échelle. » Et elle rit de sa niaiserie avant de retrouver un visage plus sérieux. « Je suis quelqu'un qui a de l'influence, très certainement. » D'un pouvoir qu'elle a reçu par la volonté du destin, un pouvoir qui ne lui appartenait originellement pas, et parfois, Rain se sent sale, indigne de ces traitements, car dans ses veines ne coule pas le sang des Im, et elle ne peut s'empêcher de penser qu'elle venait d'un endroit bien moins alléchant. « Mais à quoi bon avoir de l'influence si on ne sait pas quoi en faire. »

Et parfois, elle aimerait juste qu'on la libère.

Balance de ces corps aimantés, elle trouve les réponses à ses questions amusantes, et quand on fouille dans l'esprit de la politicienne, elle ne vaut certainement pas mieux que les pourris de la gente masculine, à utiliser le plaisir pour noyer sa peine, laissant derrière elle des cadavres de cœurs brisés qui attendent encore sûrement un message de sa part. Douée de douceurs à faire fondre les myocardes, elle leur donne à tous cette impression d'amour, les couvrant de mots doux, pour disparaître le jour d'après, n'ayant pas trouvé la personne pour qui il vaille de s'accrocher.

Les mèches de la séductrice viennent chatouiller son buste, Rain se laisse embarquer dans un cercle vicieux, les iris dévorant celle qui ne fait que lui tendre des perches. D'une main qui a oublié les règles, elle se saisit du menton de la douce pour le redresser vers son visage à elle. « Je suis ta première ? » Femme. Un oui lui ferait pousser des ailes. Et les murmures s'échangent dans une farouche intimité. Les règles, se souvenir des règles, qu'elles lui paraissent soudainement absurdes. « M'attendras-tu ? » Soufflé dans l'unique but de satisfaire son ego. La chaleur de la pièce la frappe soudainement, ou bien ne provient-elle que de son propre corps, elle lâche le menton de la belle et vient s'occuper de déboutonner le reste de sa chemise, révélant sans pudeur la forme et la couleur de ses dessous.

'Cause you got me believing
That you shouldn't be all alone

⌜ost ,,⌟

I wanna take too much,
keep me up all night

On pourrait penser qu’elle a des raisonnements d’enfants, puisqu’on l’a écrasé plus bas que terre quand elle était à peine adulte. Puisqu’on lui a appris les lois d’une hiérarchie bien respectée, on lui a montré ceux qui devaient arrondir leur dos dans l’espoir d’être épargnés et ceux qui devaient garder la tête haute. On lui a montré avec une précision assassine ceux qui devaient revenir, ceux à qui on devait faire cracher l’argent et donner un peu d’amour. Tout juste vingt ans quand elle doit laisser son corps au statut d’outil de travail parce qu’on lui assure qu’elle devait bien se tenir pour ne pas pourrir ailleurs, pour qu’on la couvre de dorure. Alors Danbi, avec le temps à ces idées de pouvoir bien à elle, construite à partir de rien dans une réalité trop naïve alors que c’était les choses qu’elle a principalement vécu. La jeune femme ne le prend pas mal quand elle la corrige et ça la fait même sourire. Elle ne se sent pas plus ou moins importante que d’habitude et préfère la laisser philosopher sans prendre le temps de vraiment comprendre ses maux pour le moment.

Ses doigts contre son menton et ses yeux plongés dans les siens incitent à Danbi à se pencher de quelques centimètres en avant encore sans briser les limites. Ses yeux cherchent les siens même s’ils sont déjà plongés dans ces prunelles sombres. D’une intimité qui devrait être interdite - mais ici la plus vieille à tous les droits -, elle laisse ce semblant de silence se créer. Ce vide qui donne envie de franchir les interdictions et de venir marquer le corps de l’autre. Mais Danbi, trop sage car on lui a appris à ne pas donner tout de suite, reste alors docile et ne bouge pas quand Rain décide de briser ce silence.

- Ma première, oui. elle lui murmure la réponse.

Les courbes de son corps lui semblent naturellement différentes des autres silhouettes qu’elle a pu rencontrer mais au final, tout revenait au même.

Libérée de sa prise, son dos se redresse légèrement, revenant former ces distances le temps de quelques secondes. Sans aucune honte, l’attention de Danbi glisse sur la peau découverte et les dernières barrières de tissus avant de remonter sagement sur le visage de sa cliente. Elle se redresse, se relève, histoire de se glisser derrière la demoiselle pour se remettre à genoux.

- Si tu promets de revenir pour moi, je t’attendrais oui. elle souffle comme s’il s’agissait d’une évidence dont on ne pourrait pas douter. Ses mains glissent le long du dos de Rain, ses doigts dans sa chevelure viennent délicatement soulever cette dernière pour libérer sa nuque des chaleurs de l’alcool. - En espérant que tu ailles mieux d’ici-là. car même si les chagrins lui rapportent beaucoup ici, elle préfère les mines trop fières.


I wanna be your needle,
i wanna lick your wound

⌜ost ,,⌟

You can use
all of me

De ces révélations en sommes bien futiles, car les billets s’accumulent aux pieds d’une déesse, offrandes sans limites de ces pauvres fanatiques à la recherche d’une affection qui n’a rien de personnel. S’ils peuvent payer, elle pourra danser, et comme la pièce qu’on insère dans le carrousel, Danbi n’est qu’objet qu’on expose devant des yeux d’enfants jamais satisfaits, et Rain n’est pas exception, malgré les courbes qui la composent.

Je te ferais goûter l’enfer,
Et avec moi, te condamnerai.

Les iris lorgnent et les lèvres s’étirent, tandis que l’atmosphère se charge un peu plus d’une électricité délectable, c’est ainsi qu’elle parvient à faire un peu la paix, Rain, laissant son esprit voguer sur des désirs primordiaux, oubliant les tracas de sa vie pour les remplacer par l'image divine de la concubine. Danbi se glisse derrière et la brune regretterait presque de ne plus l’avoir en face d’elle. Ses yeux se ferment, son corps épouse les mouvements de la douce, elle soupire et vient doucement ricaner aux mots de la princesse. « Aurais-je besoin de revenir si je vais mieux ? » Répond-elle réthoriquement, pour en provoquer celle qui fait pourtant si bien son travail. Rain renverse sa tête et vient appuyer son crâne contre le corps de la nymphe aux doigts de fée. Elle lève ses yeux brumeux vers le visage mélancolique de sa compagnie, cherchant à capter à nouveau ce regard qu’elle aime déjà tant. Sa main se lève à son tour, elle vient caresser la joue pâle de la poupée, tentée par des perspectives interdites. « When will I be able to kiss you ? » Demande-t-elle l’air de rien, comme la plus normale des interrogations.

Take a hint
Baby breathe

⌜ost ,,⌟

Icy, drop it over my head
Fleeting moments become a strong attraction

La question de la jeune femme la fait doucement sourire. C'est que Danbi avec sa jolie voix, elle enferme les plus misérables dans un cercle vicieux. Sirène, à agripper pour mieux faire couler aux plus profonds des abysses, il était commun qu'elle s'aide de la tristesse de certains pour les inviter à revenir à alléger les coeurs et les peines et doucement, ils reviennent d'eux-même, juste par plaisir de la voir, par plaisir créer de lui faire plaisir, à la couvrir de cadeaux quand eux ont soit de l'argent à jeter par les fenêtres, ou alors pas les moyens de vivre correctement. Dans sa cruauté, elle ne prend pas la peine d'y accorder une quelconque différence, et se retrouvera déçue du manque de considération si on ose détendre cette posture de fidèle.

- On ne vient pas me voir seulement quand on est misérable. elle précise, le ton amusé.

Et quand la douce se repose contre elle, sa main qui s'occupait de sa chevelure se dégage doucement pour ne pas la gêner. Mais il ne tarde pas avant que ses bras, tendres chaînes, glissent par dessus ses épaules et l'entourent pour la garder délicatement contre son corps alors qu'elle pourrait sentir sa poitrine se soulever au rythme de sa respiration. Naturellement, son regard vient retrouver son visage en sentant la pulpe de ses doigts contre sa joue. Son visage, cherchant un peu plus de contacte, s'appuya légèrement contre la paume de sa main, comme pour y retrouver la chaleur. Un rire retenu au fond de la gorge à la question, Danbi au final, ne l'imagine plus si différente des autres.

- C'est pour ça que tu as besoin de revenir sans avoir besoin d'être triste.

C'est pour ça qu'ils reviennent tous,
dans l'espoir des intentions plus intimes. A ne plus faire gaffe aux minutes qui passent, ils oublient les rendez-vous limités sous les yeux de la belle.

Thirsty like cracked dry ground,
it's like a miracle to me like waiting for rain

⌜ost ,,⌟

There's something about you
It's not that I doubt you

Comme un marin sombrant dans le désespoir, ses oreilles se tendent, son souffle s'agite et ses sens lui piquent. Attirée malgré elle par le chant de la sirène, Rain se laisse tomber dans un puit sans fond, à la recherche de sa rédemption. Elle laisse la voix de Danbi chatouiller des oreilles, ses mains de déesse caresse ses cheveux, sa peau dénudée, s'enfonçant sans mal dans son étreinte mortelle, à la recherche d'un semblant de frisson. Sa paume réchauffée par la douce, aimerait explorer, mais elle se retient, afin de pouvoir revenir, car elle en a l'envie. Danbi lui susurre des paroles d'une amère vérité, Rain sourit avant de soupirer lourdement, trop assommée par l'alcool pour répondre correctement. Retirant sa main, elle renverse sa tête en avant et se détache de l'emprise de la nymphe. Elle laisse son corps se balancer au gré de la houle, pendant que son regard prend le temps de se focaliser. « Je reviendrai sans être triste. » Répète-t-elle mollement avant de se laisser tomber sur la table basse, fermant ses yeux trop lourds, pour doucement sombrer dans des songes. Il ne faut pas plus de trente secondes pour que la brune s'endorme sous l'œil probablement amusée de la sirène enchanteresse, Rain ne se rend même pas compte de la suite des choses. Transportée par les gros bras du Pearl, on la place dans un taxi, la secoue afin d'obtenir son adresse qu'elle parvient à cracher dans un charabia propre aux alcooliques. Portière claquée, femme sécurisée, le moteur gronde et la voiture s'éloigne, dans une discrétion parfaitement assuré par l'établissement d'exception.

Angels circle around you
'Cause you shouldn't be on your own